Édito de septembre 2019
par Gorana Manenti

Une association de psychanalystes peut-elle être démocratique ?

 

C’est ce qui sera mis en débat au congrès de Palerme, du 24 au 26 octobre 2019.
Aucune association de psychanalystes ne « forme » de psychanalystes. Leur seule formation est celle de leur propre analyse, au terme de laquelle chacun « ne s’autorise que de lui-même », selon cet aphorisme de Lacan. A cet égard, les analystes sont égaux, et la hiérarchie institutionnelle ne fait que « garantir » cette formation, à laquelle un certain nombre de « contrôles » assurent que la pratique reste fidèle au « désir de l’analyste » de celui qui débute. Sans plus. Aujourd’hui, toutes les associations se conforment à ce qui n’est après tout qu’une leçon du bon sens. Le nom de l’analyste est ainsi inscrit sur la liste de ceux qui – comme lui – « ne s’autorisent que d’eux-mêmes ». Il devrait donc – a ce seul titre – pouvoir participer à n’importe quelle instance de son institution, d’ailleurs en apportant un peu d’air frais à des instances qui restent parfois repliées sur des attitudes de pensées souvent dépassées, sans compter les tentations d’un pouvoir et d’une autorité, peut être seulement morale, mais qui instaure au final des normes, une théorie, une technique de la cure souvent rigide : une Doxa. A terme elle rend inopérante la seule arme efficace de la cure, c’est-à-dire le style propre de chaque analyste. Il serait trop long de citer les exemples de ce qui devient un conformisme. On ne constatera que le résultat : aux USA, où la psychanalyse ne fait plus partie du paysage culturel. Quant à la France, certains dogmatismes lui a fait probablement tort. Mais rien n’est perdu, loin de là.

 Le bon sens amène à dire aussi qu’il serait utopique de penser qu’une institution psychanalytique – qui est inscrite dans la société – peut se passer d’instances responsables. Le problème est là : comment résoudre le conflit irrémédiable qui oppose « discours du Maitre » et « discours de l’analyste » ? Freud y avait déjà pensé. Il avait déjà prévu de dissoudre tous les deux ans son groupe, pourtant restreint, et de le refonder. Lacan a inventé le dispositif de la Passe. De son propre aveu et de l’avis de ceux qui ont repris son expérience, c’est un échec, du moins pour l’institution. Échec prévisible, d’ailleurs, car comment l’expérience de l’analyse pourrait-elle décentrer l’inertie propre à l’institution et à l’autorité qui – légitime ou pas – est un impératif.
Après ces expériences, la solution, qui est elle aussi de bon sens, est que l’institution s’aligne sur la démocratie de ceux qui ne « s’autorise que d’eux même ». La légitimité des instances est alors acquise sur l’élection de personnes et de leurs orientations, et non sur l’inertie d’une Doxa qui s’impose de sa propre lourdeur. N’est-ce pas le risque à prendre ?
À Palerme, et jusqu’à l’heure de l’assemblée générale, tout membre de la FEP peut candidater à n’importe quelle responsabilité. Après tout, n’était-ce pas le souhait de Lacan ? Une subversion toujours imminente des hiérarchies, qui libère la recherche, l’invention, qui laisse sa liberté à la pensée d’une discipline : l’avenir est ainsi devant elle.

 

 

 

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