Éditorial

Les psychanalystes pour la démocratie

par Roland Chemama

Contrairement à ce qu’ils avaient peut-être imaginé, les psychanalystes ne peuvent rester neutres en ce qui concerne les questions politiques. Nous en avons souvent fait état à partir de ce qui nous concerne au plus près, le discours et l’organisation concrète de la psychiatrie, en tant qu’elle tend, aujourd’hui, à rejeter toute référence à la subjectivité. Mais nous sommes tout autant traversés par les questions qui sont aujourd’hui les plus cruciales dans les conflits politiques à l’échelle internationale, dès lors notamment que les mouvements populistes ou ultra-droitiers menacent la démocratie elle-même.

Récemment, et après divers pays européens, c’est du Brésil qu’est venu le rappel de l’importance qu’ont pour nous « la libre expression des idées et la liberté d’association – qui traduisent la diversité politique, culturelle, religieuse et sexuelle et le rejet de toutes les formes de préjugés, oppression sociale, raciale et sexuelle ».
J’emprunte ces phrases à un manifeste signé, à l’occasion des élections présidentielles, et du risque qu’elles représentent pour la démocratie, par une cinquantaine d’Associations psychanalytiques brésiliennes, ainsi que par un grand nombre de départements universitaires. Au moment où cet éditorial sera publié le pire sera peut-être arrivé, c’est à dire l’élection d’un homme qui ne craint pas de tenir publiquement des propos misogynes, homophobes, ou exaltant la dictature militaire.
Les psychanalystes brésiliens, en tant que citoyens, se sont impliqués dans la lutte concrète pour éviter cela. Nous avons eu de même, en Europe, à prendre position concernant le type de société que nous voulons. Mais il y a sans doute une tâche plus spécifique qui nous incombe aussi. Celle de tenter de mieux comprendre le pouvoir que peut prendre le discours populiste sur le sujet contemporain. Nous avons commencé à le faire à la Fondation européenne pour la psychanalyse, notamment lors de journées qui ont eu lieu à Toulouse en mars 2018, et nous aurons à le poursuivre.

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